Actualité (mise à jour le 27/09/07) .. Parmi ceux-ci plus de 210 parlementaires de toute tendance, des Conseillers régionaux, des universitaire (Dimitri Houtcieff), des personnalités du monde judiciaire (Philippe Flores - président de l'Association Nationale des Juges d'Instance) et économique (Thomas Chaudron - président du Centre National des Jeunes Dirigeants d'Entreprise)... Vous aussi, pour l'action de groupe, faites entendre votre voix ! |
1) Qu'est-ce que l'Action de groupe ?
L'Action de groupe est une procédure par laquelle une association ou un groupe d'individus saisit seul un juge pour le compte d'un groupe d'individus qui ont le même litige. Cette personne ou cette association demande au juge de sanctionner le professionnel et de fixer le montant de la réparation que ce dernier devra verser à chaque membre du groupe. Les membres du groupe ne sont pas obligés de se faire connaître ou de donner un mandat : on parle « d'opting-out ».
Toutes les personnes qui entrent dans la définition du groupe font automatiquement partie de celui-ci, à charge pour elles de s'en exclure si elles le souhaitent, par exemple en menant une action individuelle. Le cas échéant, l'Action de groupe engagée peut donner lieu à une transaction entre le représentant du groupe et le professionnel. Le juge s'assure que la transaction respecte les intérêts du groupe et peut l'invalider.
Les membres du groupe se manifestent à la fin de la procédure pour obtenir leur indemnisation.
2) Pourquoi parle-t-on parfois d'« Action de groupe » et parfois de
« Class Action » ?
Le terme « Class Action » est utilisé aux États-Unis pour désigner ce type de procédure. Cette procédure a d'autres noms : elle est appelée au Québec « Recours collectif » et au Portugal « Action populaire ».
L'Action de groupe existe dans plusieurs pays : les États-Unis, le Canada, l'Australie, le Brésil et le Portugal.
3) L'Action de groupe est-elle un nouveau droit ?
L'Action de groupe n'est qu'une procédure, qui ne confère donc pas de nouveaux droits aux individus. Elle leur offre simplement une nouvelle possibilité effective d'accéder à la justice.
4) L'Action de groupe a-t-elle vocation à s'appliquer à des domaines d'activité différents ?
L'Action de groupe a vocation à s'appliquer à tous les types de litiges civils quels que soient les secteurs d'activité.
Il s'agit de litiges qui affectent des individus et qui peuvent relever aussi bien du droit de la consommation que du droit de la concurrence ou du droit de la santé… Le préjudice peut être physique (dommage lié par exemple à l'usage d'un produit défectueux) ou pécuniaire (dommage lié par exemple à des pratiques anticoncurrentielles ou encore au non-respect de contrats).
5) L'Action de groupe existe-t-elle aujourd'hui en France ?
Une telle procédure n'existe pas dans le droit français. Seule existe une procédure dite « en représentation conjointe » qui autorise une association nationale agréée de consommateurs à représenter en justice des consommateurs individuels, mais chaque consommateur victime doit se faire connaître et donner mandat (on parle « d'opting-in ») à l'association agréée de consommateurs.
En évoquant cette procédure, certains acteurs du débat actuel parlent abusivement d'Action de groupe alors qu'il ne s'agit que d'un « ersatz » d'Action de groupe créé dans la législation française en 1992 (article L.422-1 du code de la consommation) qui, compte tenu de ses insuffisances, n'a été utilisé que 5 fois.
Ce même type de procédure existe pour les associations de défense des investisseurs.
6) Cette procédure en « représentation conjointe » est-elle adaptée pour permettre une juste réparation du préjudice de chaque victime ?
Dans la pratique, il est impossible d'informer l'ensemble des consommateurs concernés; au-delà d'un nombre réduit de victimes (quelques centaines tout au plus), il est impossible de les atteindre toutes : la masse des victimes est dispersée géographiquement et/ou dans le temps et peut rassembler des dizaines, des centaines de milliers voire des millions de personnes. Dans la pratique, seule une part infime des victimes se retrouve jointe à l'action.
Dans la pratique encore, la gestion matérielle d'une procédure « en représentation conjointe » qui rassemblerait plus de quelques milliers de consommateurs deviendrait problématique. En effet, le mandataire, c'est-à-dire l'association, doit gérer la signature des mandats, l'envoi, la vérification et le dépôt auprès du tribunal des pièces justificatives de chaque victime et tenir chacune d'elle informée de tous les actes de la procédure.
7) Pourquoi chaque « victime » n'engage-t-elle pas une action individuelle ?
Très souvent, la réparation du préjudice individuel porte sur un faible montant (20, 40 ou 60 euros…) mais concerne un nombre important de personnes. Une majorité d'entre elles auront des scrupules à saisir l'appareil judiciaire pour une affaire de quelques euros qui mobilise en plus du temps, de l'énergie et nécessite des frais éventuellement importants au regard du montant du préjudice. Dans les situations où la présence d'un avocat est impérative et/ou la production d'analyses techniques complexes s'avère nécessaire, le coût global de la procédure devient rédhibitoire.
En supposant même que toutes les conditions soient réunies pour que chaque victime ait un accès facile à la justice et la saisisse alors individuellement, le système judiciaire imploserait sous la masse des demandes. Les greffes ne sont à l'heure actuelle pas en mesure de gérer des procédures comprenant quelques centaines de demandes individuelles.
Partagée entre la démesure d'une action en justice individuelle et le désir légitime d'être indemnisée de son préjudice aussi modeste soit-il, la « victime » ressent une frustration et un sentiment d'injustice partagé par les milliers ou les millions d'autres personnes victimes du même agissement de la par du ou des même(s) professionnel(s). Individuellement et collectivement, le déni de justice affecte le moral et la confiance des consommateurs et, plus largement, des citoyens.
8) La justice peut-elle remplir pleinement ses fonctions vis-à-vis des justiciables et de la société ?
a) La décision de justice ne s'applique concrètement qu'aux seuls consommateurs liés à l'action. Pour eux, le professionnel mettra fin à sa pratique illicite ou abusive. Pour les autres, qui sont victimes du même agissement, le professionnel leur opposera le fait qu'ils sont étrangers ou tiers à la procédure. La justice ne peut pas jouer pleinement son rôle de sanction.
Exemple : la Direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) reçoit chaque année des milliers de plaintes d'abonnés aux fournisseurs d'accès à Internet (FAI) victimes du même agissement fautif que ni elle ni les associations de consommateurs n'arrivent à stopper.
b) Dans les faits, une très grande majorité des victimes n'a pas accès à la justice et l'existence de leur préjudice n'est donc pas reconnue. La justice ne peut pas jouer son rôle de réparateur.
Exemple : en 2000, le Conseil de la concurrence a condamné pour entente illicite plusieurs établissements bancaires pour avoir conclu un « pacte de non-agression » visant à empêcher les consommateurs de renégocier leurs prêts suite à la baisse importante des taux d'intérêts. Le Conseil avait estimé le préjudice global à plusieurs centaines de millions d'euros.
c) La justice n'étant pas rendue pour les victimes, les professionnels n'ont pas à assumer les conséquences de leurs pratiques illicites ou abusives : ils peuvent agir en toute impunité.
De fait, la pratique frauduleuse se révèle « payante » pour le professionnel même s'il doit y mettre fin à la suite d'une décision de justice. Les dommages et intérêts que perçoit une association de consommateurs lorsqu'elle accompagne des consommateurs en justice sont toujours modestes et très éloignés de l'addition des préjudices individuels ou du « bénéfice frauduleux ». Il serait de toute façon peu légitime que l'association perçoive une indemnisation en lieu et place des victimes individuelles. En tout état de cause, ces dommages et intérêts ne sont donc pas dissuasifs. La justice ne peut pas jouer son rôle de dissuasion.
De son côté, le professionnel a retiré de cette opération un bénéfice frauduleux de 3 900 000 euros, dont finalement 0,0023 % a été « rendu » aux victimes. Pour l'opérateur, l'action frauduleuse a donc été « payante ». Dans ces conditions, l'action en justice n'est ni réparatrice, ni dissuasive. La violation du droit est pratiquement encouragée puisque rentable.
9) Les litiges de masse sont-ils fréquents ?
Dans une société de consommation de masse, il est fréquent qu'une pratique illicite affecte un grand nombre de personnes à la fois. Cela est particulièrement vrai dans un contexte d'accroissement de la taille des entreprises lié notamment aux opérations de concentration dans tous les secteurs de l'économie (télécommunications, services financiers, pharmacie, grande distribution, énergies, pétrochimie…).
Une masse d'individus isolés fait ainsi face à un nombre souvent restreint de grands producteurs ou distributeurs. Cette asymétrie est propice au développement de pratiques illicites ou abusives, au regard notamment du droit de la consommation et de la concurrence.
10) Quels sont les avantages essentiels de l'Action de groupe ?
a) Elle permet à tous, par son système de représentation sans mandat, d'accéder effectivement à la justice, y compris lorsque le nombre de victimes est important et que le préjudice individuel est modeste.
b) Elle permet un traitement égalitaire et étendu à toutes les victimes d'un même groupe, c'est-à-dire ayant subi un même agissement illicite ou abusif et un même préjudice d'un même professionnel.
c) Elle permet aux victimes de mutualiser les moyens : une même analyse juridique, technique ou économique va servir à l'ensemble du groupe…
d) Elle permet à tous d'accéder à la justice sans engorger les tribunaux.
e) Elle favorise une bonne administration de la justice en évitant, pour une même affaire, la multiplicité des recours devant de nombreuses juridictions, et limite ainsi le risque de décisions contradictoires.
f) Elle permet à la justice de retrouver la plénitude de ses fonctions de sanction, de réparation et de dissuasion. De fait, elle participe à la moralisation du comportement des acteurs économiques.
11) L'Action de groupe va-t-elle favoriser les parties prenantes à l'action au détriment du reste
du groupe ?
L'Action de groupe doit permettre d'éviter tous conflits d'intérêts.
a) L'individu qui représente le groupe ne doit pas bénéficier d'une réparation de son préjudice différente de celle des autres membres du groupe. Il est seulement remboursé des frais engagés qui sont liés à la procédure.
b) Lorsque l'Action de groupe est à l'initiative d'une association, celle-ci ne peut prétendre qu'au remboursement de ses frais engagés.
c) Les honoraires des avocats, notamment dans le cadre d'une transaction, sont contrôlés par le juge qui apprécie leur caractère raisonnable au regard notamment du travail fourni.
12) Les Actions de groupe vont-elles se multiplier abusivement ?
Au Québec, où le champ d'application de la procédure est sans limite, il est déposé en moyenne 30 à 40 demandes d'Action de groupe par an. En 1978, date de sa mise en œuvre, ses détracteurs en annonçaient 500.
Dans le dispositif inspiré du modèle québécois, le juge contrôle la qualité des demandes d'Action de groupe et détient le pouvoir de rejeter une demande fantaisiste, c'est-à-dire non fondée en droit, qui rassemble des personnes n'ayant pas en fait subi le même agissement.
Depuis 1978 au Québec, sur 41 demandes d'Action de groupe relatives à la prestation de services financiers par exemple (banques, compagnies de crédits, d'assurances…), seules 18 ont passé le stade de la recevabilité, 6 sur 13 en ce qui concerne l'usage de produits préjudiciables à la santé…
13) En quoi la procédure de « Class Action » américaine est-elle différente de l'Action de groupe
à la française ?
Au-delà de la recevabilité, le contrôle du juge français, à tous les stades de la procédure (recevabilité, transaction si elle a lieu, décision, estimation et modalités de liquidation des réparations individuelles), constitue une garantie contre les risques de dérive que l'on observe parfois aux États-Unis.
a) Aux États-Unis, les juges des États sont élus et certains sont réputés pour être assez complaisants avec leurs électeurs. Certains avocats s'arrangent ainsi pour déposer leurs requêtes devant ces tribunaux. En France, les décisions ne sont rendues que par des magistrats professionnels. Ces juges professionnels sont indépendants et peuvent ainsi exercer pleinement leur rôle de filtre au stade de la recevabilité, puis fixer une réparation ajustée au préjudice.
b) Aux États-Unis, des jurés composent les tribunaux et rendent les décisions. En France, il n'y a pas de jurés dans les tribunaux civils. Les décisions sont rendues par des magistrats professionnels qui ont montré depuis longtemps leur sens de la mesure, s'agissant du montant des réparations allouées.
c) À la différence des États-Unis, le droit français ne prévoit pas de dommages et intérêts punitifs, c'est-à-dire allant au-delà de la juste réparation du préjudice : toute la réparation, mais rien que la réparation.
d) En France comme au Québec, les avocats ne peuvent pas solliciter individuellement et directement des clients et peuvent donc plus difficilement susciter « artificiellement » des Actions de groupe.
14) L'Action de groupe peut-elle porter un préjudice à l'économie d'un pays ?
Il n'existe pas de véritables études sur le lien entre l'existence d'une Action de groupe et la croissance du PIB d'un pays. Néanmoins, nous constatons que la croissance économique du Canada et des États-Unis ces 10 dernières années a été supérieure à celle de la moyenne des pays de l'Union européenne et de la France en particulier.
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